A croire que tous les Francis ont un talent inné pour l’écriture (ouais je m’appelle Francis aussi). L’autre Francis, c’est Scott Fitzgerald, « Fitz », celui qui après avoir foiré Princeton a décidé de devenir l’un des plus grands écrivains américains du XXe siècle (du coup pour les Américains, c’est « plus grand écrivain de tous les temps ») avant de mourir dans la pauvreté en 1940 à seulement 44 ans. Lorsque je me faisais chier à regarder les allemands dans la rame de métro de la ligne U2 à Hambourg, je me suis dit que je pourrais plutôt fixer des yeux un bouquin de Fitz et par la même occasion leur montrer à quel point je suis cultivé. De plus, vous n’imaginez pas à quel point lire un bouquin en français dans le métro allemand suscite les regards bercés de curiosité et quelque peu excités des Mädels (« gonzesses » en allemand). Donc après avoir relu The Great Gatsby il y a quelques mois, j’ai décidé de faire commande groupée sur la Fnac. Dans le pack sont inclus: This Side of Paradise, The Beautiful and Damned, Tales of the Jazz Age et une bonne dose de potentiel de chope en transport en commun. Mais ne rêvez pas, eye-contacts en poche, à la manière d’Amory Blaine –héros de This of Paradise quasi-autobiographique de Fitzgerald– je suis rentré seul tous les soirs chez moi, rêvant de la bouche raffinée d’une jeune blonde aux accents nordiques ou d’un joli cul bien ferme à la peau douce et délicate, un livre de Francis à la main. Morale de cette histoire qui vous fait une belle jambe: lisez Fitzgerald pendant ce long week-end de quatre jours avec un paquet d’After Eight sur votre clic-clac IKEA, puisque de toute façon, les teens ne savent pas qui c’est.

Francis Scott Key Fitzgerald est né le 24 septembre 1896 dans une famille de la classe moyenne de Saint-Paul, Minnesota. Ca ne vous avance pas plus mais je vous le dis quand même. Sur cette photo, il doit avoir 13 ou 14 ans. On est donc en plein "Golden Age", ou "Belle Époque" en Europe.

En 1911-1912, Fitz passe par la Prep School d'Hackensack. Ce sera son pass d'entrée pour Princeton, un an plus tard.

L'époque Princeton (1913-1917) est déterminante pour Francis. Tout d'abord attiré par la haute-société surfaite de la côte-est américaine, c'est à cette époque qu'il se met à écrire des nouvelles pour le Princeton Tiger et le Triangle Club. Désabusé, aigri par les gens qui l'entourent, son regard sur cette société dénuée de sentiment devient sévèrement critique et son premier livre est refusé. L'écrivain F. Scott Fitzgerald est né!

Comment imaginer que l'un des plus grands écrivains de ces derniers siècles est un looser poisseux: pas spécialement doué à l'école, il décide de se faire remarquer en quittant Princeton pour enfiler le costume de l'armée en 1917. Manque de pot: la guerre se finit peu après son enrôlement. Il n'aura même pas le temps de quitter le sol américain.

L'après-Princeton est une révélation. Francis rencontre Zelda, une fille de la jeunesse dorée originaire d'Alabama. Cette partie de la vie de l'écrivain inspirera fortement The Romantic Egotist qui deviendra à la demande de l'éditeur This Side of Paradise, en 1919. Le même éditeur, Charles Scribner's Sons, qui lui avait refusé son premier écrit quelques années auparavant. Fitzgerald est dans l'air du temps à l'époque du jazz et des garden-parties luxueuses.

Après un court passage dans une agence de publicité, le Jazz Age et ses Flapper Girls vont inspirer ses plus grands romans à Fitzgerald. Son recueil de nouvelles à l'humour taquin Tales of the Jazz Age, dont le très connu The Curious Case of Benjamin Button, est l'un des plus beaux témoignages écrits sur cette époque.

Francis et ses oeuvres sont une référence chez la jeunesse du début des années 1920. Lorsqu'on le voit ici accompagné de Zelda dans une voiture flambant neuve, difficile de ne pas penser à son Great Gatsby qui paraîtra en 1925. La nouvelle recevra pourtant un accueil mitigé, mais elle reste l'une des histoires les plus adaptées au cinéma.

F. Scott Fitzgerald en 1920. Pour en revenir au style, la raie centrée et le costume trois-pièces pinstripe restent un classique des Roaring Twenties.


"Real men read": cette phrase que j'ai récemment lue s'accordait parfaitement à Fitzgerald. Il a lu des livres par centaine depuis sa tendre enfance.

Zelda et Francis sont un couple célèbre et une fois mariés, ils n'hésitent pas à s'afficher ensemble. Ce portrait du couple en 1921 a été dessiné par Gordon Bryant.

Comme la plupart de ses autres oeuvres, The Beautiful and Damned (1922) est un récit quasi-autobiographique, qui retrace sa vie avec Zelda dans la haute-société est-américaine. Ses personnages sont complexes et profondément dégoûtés par le monde qui les entoure.

Zelda et Francis à la maison familiale, 1921.

Fitzgerald en 1925, année de parution de The Great Gatsby.

Bien qu'ils semblent heureux ici à Annecy avec leur fille unique, Frances Scott "Scottie" Fitzgerald, les Fitzgerald commencent à accuser le coup du Krach de 1929. Comme beaucoup de ceux qui ont profité des Roaring Twenties et de ses excès.

Pour continuer de gagner sa vie, Fitzgerald se voit contraint d'écrire des scénarios pour la MGM et des films publicitaires dans la seconde moitié des années 1930. C'est à cette époque qu'il écrit un receuil de 17 histoires courtes et drôles où il se décrit comme un écrivain au rabais ("hack", ou "écrivaillon" en français): The Pat Hobby Stories. Son couple aussi bat de l'aile et il passe la plupart de ses dernières années avec l'auteure Sheilah Westbrook.

Alcoolique depuis sa période d'étudiant et connu aussi bien pour son talent littéraire que ses grosses mines, Francis est atteint de la tuberculose. Carl van Vaechten est un des derniers à avoir pu faire des photos de l'auteur en décadence, le 4 juin 1937.

F. Scott Fitzgerald meurt d'une énième crise cardiaque le 21 décembre 1941. Son roman posthume, The Last Tycoon, retrace la vie du producteur de cinéma Irving Thalberg. Zelda le suivra de peu puisqu'elle décède en 1948. Il laisse derrière lui une série d'oeuvres exceptionnelles qui ont créé un mouvement littéraire dramatiquement représentatif de sa propre vie et de son époque, justement nommé par Ernest Hemingway: The Lost Generation (la Génération Perdue).
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