greensleeves to a ground

Mois : septembre, 2010

GSTAG Look #4: Preppy Fundamentals.

Le preppy est partout! Chez H&M, Zara, dans Marie Claire, dans Télé 7 Jours, absolument partout. A cette allure, demain, Decathlon nous vendra sa collection preppy. Nous vendra? A condition d’acheter. Le parisien dévergondé s’en réjouit: « regardez, je me suis lancé dans le preppy! », nous glisse-t-il, entre deux titres de Bob Sinclar, armé d’un pull sur les épaules et d’une Mini Cooper, ses cheveux à la Justin Bieber dans les yeux. Ne soyons pas bête, au même titre que le Père Noel ou Halloween, le mot « preppy » est devenu un subterfuge commercial, pour vendre à des inconscients le moindre petit bout de culotte qui fait « bourgeois ». C’en est désolant. Car le « preppyisme » – et nombre de gens se sont employés de manière bien plus adroite que moi à le définir – est avant tout une « catégorie sociale », une appartenance à une élite traditionnelle américaine ayant, de fait, fréquenté les universités prestigieuses, de l’Ivy League entre autres. Etre un prepster, c’est avant tout un art de vivre, le respect d’une certaine tradition, de legs et de bonnes manières.  Ceux qui n’en sont pas encore sûr n’ont qu’à lire l’Official Preppy Handbook. Je ne puis certes me réclamer de cette appartenance, n’étant ni américain, ni étudiant, ni descendant d’Irlandais, ni riche d’ailleurs. Rien en moi ne fait WASP, rien dans mon parcours ne me rapproche de ce monde. Si ce n’est le style. Si mes origines n’entrent dans aucune case du parfait preppy, je fais le maximum pour au moins respecter leur manière de s’habiller, sans employer le mot à tort et à travers. Remettons un peu d’ordre dans ce flot de preppy par-ci, preppy par-là. Revenons aux fondamentaux et oublions un instant les collections « preppy » des Grands Boulevards parisiens. Il suffit de jeter un seul coup d’oeil à ces photos du début des années 1980 pour comprendre: une veste en tweed, un pull col rond, une chemise oxford, un pantalon en velours côtelé et des Top-Siders. Et le tour est joué! Rajoutez un peu de Go-To-Hell (ici le pull à torsades jaune poussin) et vous prouverez à tous vos camarades que vous pouvez être étudiant en physique quantique à Princeton, posséder un cabinet de curiosités dans votre salon tout en gardant votre part d’humour et de simplicité. Laurent Laporte, encore une fois auteur de ces magnifiques clichés et propriétaire de la boîte à papillons, n’en penserait pas moins.

Harris Tweed Herringbone sportcoat; navy corduroy pants; Sperry Top-Siders.

Cableknit Sweater Gant Rugger; Oxford Shirt Uniqlo.

Butterflies Collection from Laurent.

Et comme toujours, plus de photos sur le blog de Monsieur Laporte.

Inspiration: le workwear des années 1930/1940.

Laissons de côté quelques instants l’Ivy Look, puisque je n’avais pas crée ce blog seulement pour lui. Sans vouloir tomber dans l’annonce de tendance pour la saison prochaine, style magazine féminin, on peut dire que le workwear aura toute sa place cet hiver. Ce n’est pas nouveau, certes, mais le workwear fait partie de ces « styles », tels que l’Ivy Look, qui ne tomberont jamais dans l’oubli. Au-delà du jean vintage brut et des boots Red Wing, tournons-nous vers un mélange et une superposition des matières propres aux ouvriers des années 1930 et 1940. Solides et chauds, ces matériaux textiles sont ancestraux et ont une qualité souvent hors-pair. Et c’est pourquoi ils sont intéressants à marier. Combiner le tweed au cuir, le jean à la chemise plaid en flanelle, le velours à la chemise chambray, le pantalon chino au blouson en cuir, est dénué de tout risque. Empiècements, superpositions, grosses doublures en mouton, tout est bon à prendre, comme le montre parfaitement la collection hiver RRL. A travers ces rares photos couleurs de la Library Of Congress, dâtées de la Grande Dépression, on découvre des travailleurs de l’acier acharnés, des fermiers marqués par la culture de leurs terres, des pilotes prêts à partir en mission… Leurs principaux soucis: se protéger du froid, des outils tranchants, des brûlures, de la graisse ou encore de la suie du charbon. Alors question robustesse du vêtement, on peut leur faire confiance. Ok, vous ne vous habillerez pas exactement comme eux cet hiver puisque vous avez rarement affaire à une locomotive à vapeur, mais ils vous donneront certainement de bonnes idées pour assembler vos propres matières traditionnelles dans le bon sens, et vous maintenir au moins au chaud.

Les Thomas, fermier de Pie Town, au Nouveau-Mexique (1940). Remarquez le travail de retouches sur la chemise, le gilet en tweed léger et cette incroyable veste en cuir et peau de mouton.

A.S. Gerdee, aiguilleur à Chicago (1943). Chemise en flanelle et veste en jean.

Veste en denim brut sur une chemise chambray, et casquette en velours côtelé: la tenue workwear par excellence.

Mike Evans, soudeur au triage Proviso à Chicago (1943).

Un équipage de bombardier de l'USAF recoit ses dernières instructions sur la base de Langley, Virginie. En chino et A2 flight jacket, cela va de soi! (1942)

Interview sur Ivy Style.

Peut-être avez-vous été assez curieux, et pourquoi pas fidèle, à GSTAG pour savoir que Christian Chensvold m’a interviewé. Le résultat (que vous pouvez lire ici) s’est retrouvé sur son excellent site, Ivy Style, puis a été relayé par Valet et Racked. Evidemment c’est un immense honneur, moi qui ai connu tout ce que je sais aujourd’hui grâce à des blogs comme le sien (plus mon acharnement à vouloir replacer le moindre bout de tissu dans son contexte historique). Les photos de Laurent sont grandioses et sans lui, il n’y aurait jamais eu cet intérêt autour de GSTAG. Je posterai prochainement les séries de photos qui n’apparaissent pas dans l’interview, réalisées un beau dimanche matin de septembre, aux alentours d’Invalides, à Paris. En attendant, je tiens à remercier Laurent Laporte, Christian Chensvold et mes lecteurs/trices(?).

F.

« The Ivy Look: An Illustrated Pocket Guide » Interview.

Dans la catégorie « Indispensables de la bibliothèque du style », l’Ivy Look Pocket Guide se pose là! Des tonnes de vieilles pubs, de covers de jazz des années 1960, de photos rares des plus dignes représentants Ivy qui décrivent dans son essence la plus pure ce style qui fait tant parler de lui. Ajoutez à cela des textes bien sentis, qui sont plus des témoignages de deux auteurs anglais qui ont vraiment connu l’Âge d’Or de l’Ivy Look et continuent de le vivre au quotidien, et vous obtenez une approche complètement nouvelle dans le genre. JP Gall et Graham Marsh ont cordialement accepté une interview pour GSTAG. Un livre à placer sans hésiter entre Take Ivy, qui monopolise injustement l’actualité, et le Preppy Handbook.

Download the original ENGLISH version.


Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs?

John Gall: JP Gall, Mod, flâneur, vendeur et auteur.

Graham Marsh: Graham Marsh est directeur artistique, illustrateur et auteur. Il ne porte jamais  de veste croisée, ni de chaussures noires.

Comment en êtes-vous venus au look Ivy?

G.M.: Comme je le dis dans le livre, j’étais addict aux vêtements Ivy. Ca a commencé lorsque je les ai vu portés par les férus de modern jazz habitant à Londres, dans le Department of Marvel Comics où je travaillais au début des années 60. C’était un monde d’initiés où l’on voyait des costumes Ivy avec cols étroits, de fines cravates en laine et des coupes de cheveux courtes. La bande-son de cet univers détaché et cool:  Miles Davis, Gerry Mulligan et Jimmy Smith. Je voulais y pénétrer et m’imprégner de tout ce que ce monde avait à offrir.

JP.G.: J’ai toujours fait un effort pour être différent de mes pairs. J’étais ado dans les années 1980 et je me sentais totalement déconnecté de la tendance musique et mode de l’époque. Je remercie deux personnes. Tout d’abord, Paul Weller qui a fait de moi un Mod, parce que c’est de là, par un processus de curiosité, que j’ai connu l’Ivy League. Et je remercie aussi John Simons, le mentor de nombreux gamins passionnés par la culture jazz et Ivy League des origines. Entrer dans son shop à Covent Garden m’a non seulement fait découvrir les Bass Weejuns et les chemises Oxford, mais aussi Dakota Staton, László Moholy-Nagy et le mobilier en contreplaqué. C’est d’ailleurs dans le shop de J. Simons que j’ai rencontré des mecs cool comme Graham.

On connaît déjà de nombreux écrits papiers et virtuels sur ce style. Quelle idée vous a poussé à écrire un nouvel ouvrage sur l’Ivy Look?

G.M.: L’idée du livre était de produire un guide de poche concis et illustré qui mettait en avant tous les éléments essentiels de l’Ivy Look, que l’on a toujours arboré avec John. Même si ce style était dominé par les dress codes masculins américains de 1955 à 1965, il s’est perpétué à travers les âges pour devenir l’essence du goût et du style. Ce livre est destiné à tous les néo-mods, designers, stylistes et photographes qui auraient aimés être là à l’époque, et un souvenir visuel pour tous ceux qui étaient là.

JP.G.: C’est un style qui a une grande ampleur et Graham n’arrivait pas à croire qu’il n’y ait pas encore de livre sur le sujet en anglais. Il y avait le Preppy Handbook, évidemment, mais qui était plutôt humoristique et très centré sur les Américains. Il n’y a que les Japonais qui ont écrit sur l’Ivy Look avec une passion et un engagement incroyables. C’est un gros coup de chance de voir la réédition de Take Ivy paraître en même temps que notre livre. En fait, on voulait retranscrire visuellement l’atmosphère des vêtements, des pubs et des covers de disques de l’époque dans un livre abordable, pratique et stylé. Nous ne sommes pas académiques, nous sommes des dingues de fringues avec Graham. Et il se trouve qu’il est un excellent book designer, bourré de matériel d’archives qu’on a exploité avec grand plaisir.

Votre approche du style Ivy est nouvelle, puisque vous le considérez non pas seulement comme un phénomène de mode vestimentaire mais comme un style de vie à part entière, entre design, mode et musique. Un peu comme les Mods anglais le faisait. Etait-ce aussi vrai aux Etats-Unis?

JP.G.: Graham répondra mieux que moi. Tout ce que je peux dire, c’est que la plupart des gars à bloc sur l’Ivy que je connais  sont de sérieux connaisseurs de jazz. Le modern jazz des 1950s était typiquement Ivy League. Lorsque Miles Davis, Gerry Mulligan et les autres ont viré vers les lignes simples du style Ivy, ils représentaient la dynamique de la musique qu’ils jouaient. Les images et les sons parlent d’eux-même. C’est par le jazz et le cinéma que d’autres pays sont tombés amoureux de l’Ivy League américaine. Ca représentait quelque chose de différent: plus séduisant, plus branché, plus ouvert et populaire. La France et l’Italie faisaient partie  du mélange et évidemment. Lorsque l’on voit Belmondo dans „A Bout de Souffle“, on comprend que beaucoup de personnes dans ces pays ont adopté l’Ivy Look. Il ne se serait jamais habillé comme ca quelques années auparavant. C’est ce courant d’influences que l’on a essayé d’illustrer dans le livre.

G.M.: La côte-est américaine est sans conteste le berceau de l’Ivy Look. On faisait attention à soi, on cherchait une allure pointue. La culture sentait la modernité. Pour les non-Américains comme John et moi, cette culture est d’abord apparue à travers les vêtements Ivy League. Pas spécialement par le costume gris de flanelle, mais plutôt par ces “Saints Hipsters” que l’on voyait sur les covers de modern jazz, plus quelques acteurs clés de cinema et de télévision. Ils portaient tous des costumes bleu marine en hopsack, beiges en popeline, des seersuckers et des vestes marrons ou grises en tweed léger et herringbone. En Angleterre, les Mods qui envahissaient Londres au début des années 60 ont également absorbé ces influences  Amércaines et Européennes: les coupes de cheveux venues de France, les scooters d’Italie, les vêtements des US, tous portés avec cette attitude laconique typiquement londonienne. L’importance de l’import marchand concernait tout aussi bien les vêtements que la musique. En même temps que le jazz s’écoulait par les labels Stax, Atlantic et Motown, le look des Mods perspicaces devenait strictement Ivy League.

Le jazz représente une grosse partie du livre. Quel est son véritable lien avec l’Ivy Look?

JP.G.: Miles Davis est considéré comme l’un des premiers à avoir adopté cette silhouette plus mince de l’Ivy. Musicalement, il était le meilleur et j’imagine qu’il était le mieux placé pour redéfinir tous les codes visuels du jazz – moderne, élégant, cultivé. C’était tout de même un fils de dentiste, un parfait petit gars de la middle-class.

G.M.: C’est sûr, il y a un lien evident entre le jazz et l’Ivy Look. Mis à part le fait que les covers de jazz étaient un condensé de tout ce qui se passait dans  le design graphique d’après-guerre, elles repésentaient également un guide photographique sans égal pour tous les vêtements Ivy League que portaient les musiciens. La musique reflète ainsi parfaitement les sensibilités de tout Modernist qui se respecte.

Comment expliquez-vous ce retour fracassant du style Ivy des années 1960?

G.M.: Comme tous les mouvements d’influence culturelle et vestimentaire, l’Ivy Look refait surface de temps en temps et prouve qu’il est toujours présent. Et c’est pourquoi, d’après mon opinion, il est, après le jazz et les films américains, la troisième grande forme d’art moderne majeure venue des US.

JP.G.: Je pense qu’il y a beaucoup de choses à prendre en compte. Premièrement, il y a une certaine résistance à tous les pires excès de la globalisation et notamment aux comportements des grandes marques de mode qui abandonnent petit à petit la qualité et la tradition, pour augmenter leurs marges. S’intéresser au vintage ou au vêtement bien fait est une forme de résistance à tout cela. Ajoutons aussi l’importance grandissante de l’héritage. Le 20e siècle est le siècle précédent désormais. Regardez en arrière: tous ces incroyables changements culturels dans les vingt années qui ont suivi la Deuxième Guerre. Les produits de l’époque semblent plus frais encore aujourd’hui. Et puis il y a la révolution internet, qui a permis à des groupes de se former, de partager et d’échanger sur des passions communes. Ironiquement, je trouve que c’est un aspect très positif de la globalisation. Qui ne suivait pas l’expansion japonaise de l’Ivy League avant l’arrivée du web? Il y a toujours eu un nombre important de gens intéressés par ce style, y compris chez les meilleurs stylistes, designers et revendeurs. Je sais que beaucoup de gars qui ont vécu leur vie d’adulte s’accordent sur ce point. Et bizarrement, cette passion s’intensifie avec l’âge. Comme le vieux cliché le dit: le style Ivy passe aussi bien à 70 ans qu’à 20. Il y a quelque chose de magique là-dedans.

Merci à Graham et John.

Pictures taken in « The Ivy Look » by Graham Marsh and JP Gaul (Frances Lincoln, £12.99)

Suedeheads: l’influence Ivy League en Angleterre.

Entre 1969 et 1970, l’hiver anglais fut rude, particulièrement froid. Certains skinheads, frileux sous leur crâne rasé décident de se laisser pousser les cheveux. Naissent alors les Suedeheads, en version poétique mais relativement plausible. De même que leur apparition serait dûe à l’influence énorme du film Bronco Bullfrog, qui raconte l’histoire de Del Walker, un Suedehead de la working-class de l’Eastend londonien. Visuellement et grossièrement, le suedehead est une évolution du skinhead inspirée par le style universitaire américain. Encore plus forte peut-être fût l’influence du magasin de John Simons, The Ivy Shop, situé dans le quartier de Richmond et ouvert en 1965: il a été le premier à apporter la culture Ivy League en Angleterre donnant naissance aux mythiques Mods. Le magasin, malheureusement fermé en 2009, aurait été plus que d’actualité aujourd’hui, où même Hackett se met à faire de l’Ivy Look.

Lorsque l’on voit l’image précédente (trouvée sur styleforum)  extraite du livre « Skinheads » de Nick Knight, illustré par Jim Ferguson, difficile de ne pas penser à Steve McQueen (encore lui!), icône de l’époque: son style casual penny loafers, Oxford Shirts, Sta-Prest et blouson Harrington et même la coupe de cheveux sont repris par les Suedies sans scrupule aucun pour Frank Bullitt.

Dans un style plus smart, le suedehead n’hésite pas à enfiler des costumes à motifs Prince de Galles ou pied de poule,  taillés près du corps avec des Brogues et un trench court à boutons cachés. Les marques Ben Sherman, Fred Perry, Baracuta, Sta-Prest ou Brutus (qui fabriquait des chemises de grand-père sans col) connaissent alors un véritable essor. Tout comme les chaussettes de couleurs, petite touche anglaise dans ce style finalement très Ivy.

Les plus perspicaces d’entre vous auront vu le lien évident qu’il y a entre les Suedeheads et les Mods de la même époque. Sur ces derniers, je ne m’étalerai point puisque ce blog le fait très bien. Même si elle est souvent qualifiée de sous-culture des Skinheads, la culture Suedehead va bien au-delà d’une simple évolution vestimentaire presque logique: ce sont eux qui amènent par exemple le reggae (par le biais de Trojan Records) , la soul ou encore le ska dans les milieux Skinheads. Et si l’on veut analyser brièvement le côté social, il faut savoir que le style plus « formal » des Suedeheads a tout autant touché les classes ouvrières qui aspiraient à des places plus prestigieuses, que les « white-collar », les cols blancs, bureaucrates de la middle-class, soucieux de coller à un style frais et moins agressif que les bretelles, jeans larges et rangers des premiers Skinheads. Et puis qui manque de style à partir du moment où il chevauche un Lambretta, scooter légendaire des Mods et Suedies?

Vous aurez compris qu’il est difficile de faire le tour de la question Suedehead tout en gardant votre attention, et qui plus est, sans une seule image de Playmate des années 70. C’est pour celà que je fais ici un simple travail de médiation, pour amener à vos oreilles le terme Suedeheads expliqué en version courte. Mais je vous recommande vivement  cet excellent article plus que complet, d’Alex Roest, diffusé sur le site Film Noir Buff pour un approfondissement de ce sujet passionnant.

Scans de « Get Smart » pour le styleforum consacré aux Suedeheads.

Duke ActIVYsm.

L’université de Duke est l’une des meilleures des Etats-Unis, et compte parmi les dix meilleures du monde. Pour un exemple concret: Richard Nixon et l’ancien président du Chili, Ricardo Lagos ont posé leur derrière sur ses bancs, entre autres prix Nobel et patrons des plus grosses entreprises mondiales. Remaniée – mais pas fondée – en 1924 par James B. Duke, cela en fait l’une des plus jeunes universités américaines.

The Duke Vigil Le 5 avril 1968, 1400 étudiants se mobilisent silencieusement dans le parc entourant la chapelle, suite à l'assassinat de Martin Luther King Jr., la veille. Au nom de l'égalité des races.

Etant située à Durham, Caroline du Nord, elle n’a jamais fait partie de l’Ivy League, réservée aux plus anciennes universités du nord-est américain. Mais cela n’a pas empêché aux étudiants du fameux Trinity College (l’une des écoles du campus) d’adopter l’Ivy Look dans les années 1960: Weejuns, White Wool Socks, Harrington Jackets, Oxford Shirts, High-Water Pants, … Bref, un peu tout ce que vous savez déjà si vous suivez ce blog. Mais le discours de Martin Luther King Jr. prononcé en 1964 à l’université, puis les nombreuses manifestations contre la Guerre du Viêtnam ajoutent à ces quelques clichés une dimension supplémentaire.

La manifestation a commencé par une marche silencieuse de 3 miles le 5 avril 1968. 450 étudiants y prennent part. On est en pleine période "Take Ivy": Weejuns, peacoats, trenchs, harrington, ...

Le style replacé dans un contexte historique prend un sens tout particulier ici et confirme bien que les années 1960 sont une période de transition entre une après-guerre frigide et la libération des moeurs des années 1970. On commence à avoir une conscience collective chez les jeunes générations, on se mobilise contre des décisions de l’Etat, on se mobilise quand une icône de la liberté meurt. Ce qui explique pourquoi l’Ivy Look a si peu duré (« officiellement ») et se concentre approximativement entre 1964 et 1969.

The Duke Vigil durera du 5 au 11 avril 1968. Ici, l'étudiant du centre porte ce chapeau typique de l'Ivy Look: le Bucket Hat. Un chapeau de pêcheur, en fait, cerné d'une ruban et en popeline chez Brooks Brothers. A noter aussi, les Roper Boots.

Au-delà des excellents témoignages visuels de Take Ivy (réedité et déjà disponible), l’absence de véritable texte dans le livre empêche peut-être d’expliquer « pourquoi l’Ivy Look? ». Pourquoi est-il apparu à ce moment-là? Pourquoi dans les universités? Pourquoi a-t-il été aussi éphémère? Pourquoi revient-il en force aujourd’hui? Replacez les choses dans leur contexte, comme le font ces excellentes photos des archives de Duke et méditez. L’Ivy Look est peut-être bien plus qu’une simple question de pantalon trop court pour mettre en évidence ses Penny Loafers!

Passons à quelque chose de plus gai: les Freshmen Arrivals. L'arrivée des nouveaux, qui étaient un véritable rite dans les universités américaines.

Avec la Cox, on est sûr de ne pas se tromper d'époque. Ce sont bien les 1960s. Letterman Sweaters pour ces Cheerleaders de l'équipe de foot US de Duke: les Blue Devils.

Coup de balai dans l'allée principale! Cette photo se passe de commentaires "stylistiques": ces cinq étudiants représentent à eux seuls toute une époque de look et d'attitude.

© Courtesy of the Duke Library Archives.

Career Club: qui a le droit de porter une Oxford Shirt?

Dans cette publicité de 1963, postée par « Staceyboy » sur le forum de Film Noir Buff, tout est dit. La chemise button-down est un classique en plein boum qui n’est plus seulement réservé aux universités américaines. Elle s’étend aux bureaux de Manhattan, aux restaurants qui entourent Wall Street. Mais Truval Shirts entend bien sélectionner ceux qui la porteront avec sa collection Career Club qui perdurera jusque dans les années 1980, notamment avec ce magnifique exemplaire embroidered, ou celui-ci de 1976, encore plus phénoménal. Inutile de vous dire qu’en trouver une sur Ebay serait une véritable aubaine. Rassurez-vous, j’ai déjà cherché et elles sont rares, très rares. Voici, en tout cas, un document d’époque qui mérite d’être lu en intégralité, puisqu’il a un ton très particulier, un peu agressif même, certains penseront (on était visiblement plus réceptif à l’humour dans les 1960’s). Mais il est propre à la marque, comme d’autres annonces presses le prouvent (ceux qui achèteront le Pocket Guide Ivy Look pourront le constater par eux-mêmes). Je me suis donc abstenu de traduire le texte pour garder intact la plume du concepteur-rédacteur qui, sans aucun doute, devait entrer dans la catégorie apte à porter une Career Club.

Virginia Tech en 1967.

Tout est compris dans le titre et dans la date. Quelques impressions de la vie sur le campus de Virginia Tech, située à Blacksburg (Virginie) au sud-ouest de Washington. Sur près de 27 minutes de film, on a le temps de s’ennuyer et c’est pour cela que j’ai sélectionné les passages intéressants pour les plus pressés d’entre vous.

Après une introduction à l’eau de rose, où le Roméo se permet tout de même un V-Neck jaune et un flat front chino high-water, on passe tout de suite à un parfait exemple de tenue universitaire avec la chorale à 2:08. Navy blazers blasonnés et associés à des cravates clubs.

A 2:57, sur une musique 60’s, on passe à une vue d’ensemble de l’esplanade du campus avec de superbes détails sur les étudiants: chinos, harrington bleu marine, oxford-shirts manches courtes ou manches longues en tous genres pour les hommes. Jupes et pantalons acidulés, robes à fleurs ou en laine, pull sur les épaules et même cape pour les femmes. Grosse mention pour l’attitude du gars en short, sous un arbre, au tout début de l’extrait.

A 5:50, nouveau tour sur le campus. On commence avec deux superbes exemples de blousons universitaires puis beaucoup de trenchs (droits et sans ceinture), accessoire essentiel de l’Ivy look.

Enfin, à 18:25: short madras et sweatshirt rouge à moto! Puis une nouvelle vue d’ensemble d’arrivée des étudiants sur le site de Virginia Tech.