greensleeves to a ground

Mois : avril, 2010

Les chaussettes Adler.

Lisez tout ce que vous voulez, consultez les blogs qui vous chantent, tous vous déconseilleront les chaussettes blanches. Alors oui, on est d’accord : pas de chaussettes blanches avec un costume. Cela ne changera jamais. Mais si à une certaine époque, on avait su les porter correctement ces chaussettes si répugnantes aux yeux du pseudo-fashion contemporain ? Cela a été le cas, des somptueuses années 1950 à la fin des années 1960. Les mythiques Adler White Wool Socks et leur blanc cassé allaient vivre leur idylle courte et passionnée avec les pieds et chaussures des étudiants de l’Ivy League et même de Kennedy, McQueen ou Newman. En effet, quoi de mieux pour « mettre en lumière » vos loafers ?


Pas évident de trouver des infos sur ces chaussettes qui ont fait les riches heures du casual wear américain dès les années 1950. Il faut se contenter de photos d’époques et de quelques pubs. Comme leur nom l’indique, les chaussettes Adler sont en laine, relativement épaisse mais faite à partir de petites fibres, et ne sont pas d’un blanc impeccable. Du moins pas après le lavage, comme l’indique l’extrait d’interview à venir. Disons plutôt : blanc cassé, blanc écru, peut-être même beige clair. D’après l’annonce presse ci-dessus, la chaussette Adler est celle qui va avec tout et qui fait que vous êtes libres de faire ce que vous voulez. Très bon discours pour convaincre les jeunes étudiants des universités américaines.

Le style parfait pour porter des Adler White Socks : polo, short madras penny loafers. (extrait de Take Ivy)

Un autre exemple parfait, même époque.

Ken C. Pollock, un « Southern Gentleman » parle des Adler Socks et de la manière dont on les portait, dans une excellente interview réalisée par Christian Chensvold (Ivy Style) : « Nous aimions beaucoup les uniformes (comprendre pantalon chino et blazer, ndlr), tout comme les étudiants aujourd’hui aiment leur t-shirt, leur pantalon cargo et leur claquettes. Puis il y avait les loafers Weejuns, qui devaient être les plus abîmées possible, et souvent réparées grâce à du Duct Tape (ruban adhésif). Avec, nous portions d’épaisses chaussettes blanches en laine fabriquées par Adler. L’étiquette disait « Ne pas passer à l’eau de javel », alors évidemment on le faisait tous. Elles tournaient rapidement au jaune fadasse et c’est devenu la couleur standard pour tout le monde. »

Un bel exemple de la tenue décrite par Ken C. Pollock (plutôt fin des années 1950).

Un autre extrait de Take Ivy : chino, blouson et loafers, à vélo.

« Les Adler White Wool Socks faisaient un tabac dans les universités du sud vers la fin des années 1950 jusque dans les années 1960, ajoute Ken C. Pollock. Tout le monde les passait à l’eau de javel et ça donnait une couleur très légèrement jaune/orangé. Elles se trouaient vers le haut à une vitesse incroyable. Avec leur couleur unique, elles étaient LE truc à porter avec une chemise madras à manches courtes, un chino, un blouson Baracuta G9 et des Bass Weejuns ! »

Avec un blouson style harrington...

Il semble donc que ces chaussettes aient été un véritable phénomène de société, que l’on pouvait acheter pour 1$ de l’époque. Pour preuve, une chanson leur est même consacrée par  The Denims (l’un des milliers de groupes universitaires américains qui jouaient du rock garage), sortie en 1965.

The Denims -Adler Sock-

Plus tardivement, l’alternative consistait à se tourner vers d’autres chaussettes blanches marquées de rayures au sommet : les Wigwam. Kennedy semblait apprécier les blanches à bandes bleu et rouge (photo ci-dessous). Elles sont plus difficiles à porter car, aujourd’hui du moins, elles sont vraiment connotées « chaussettes de sport bas de gamme ». L’autre alternative : les Adler de couleur, qui prendront le relais des blanches.

Regardez les pieds de Kennedy : ce sont certainement des Wigwam à rayures bleu et rouge. Ici, lors de l'America's Cup 1962 avec sa femme.

Une des nombreuses photos de Newman où on peut le voir porter des chaussettes claires.

Impossible de trouver des Adler White Socks aujourd’hui, mais il reste facile de trouver des chaussettes « blanc cassé » pour porter avec vos chinos, madras et loafers. Notamment, chez Wigwam qui fabrique encore ce même type de chaussette : à en croire les reviews des clients, elles seraient identiques aux Adler. Burlington avait bien racheté la marque mais a immédiatement stoppé la production de la mythique chaussette de laine. La fin d’une bien belle époque.

Le modèle White Husky de Wigwam.

Holidays

Bonjour à tous,

je serai de retour, après un repos bien mérité et avec un nouvel article, aux alentours du 20 avril.

A bientôt.

F.

Welcome Home Mister Ralph Lauren !

Enfin ! La superbe boutique Ralph Lauren que l’on attendait tant dans la capitale ouvre ses portes. Après des années passées à chercher les pièces du grand ponte de l’American Style dans la restreinte boutique de la Madeleine, ou la « encore plus réduite » boutique de Cannes, nous voilà impatient, salivant à l’idée de découvrir ces 1200 m² (!) de pur bonheur. Car oui, c’est bien de bonheur dont on parle. En effet, l’ami Ralph ne viendra pas seulement déposer quelques cravates ou short madras de sa nouvelle collection Polo, mais apportera au 173 boulevard Saint-Germain : les Purple et Black Label pour les hommes, les Blue et Black Label pour les femmes, toute la collection Polo, évidemment, un salon « horloger » et surtout, et surtout… LE restaurant Ralph Lauren ! Style country, burgers, baked cheese et autres spécialités américaines, etc. Ce sera le deuxième au monde après celui de Chicago, dont il s’inspire fortement. On s’y voit déjà. Seule petite déception, l’absence du label Rugby, que l’on attend toujours hors-US pour ses Letterman Sweaters et ses Rugger Shirts exceptionnels. Quoiqu’il en soit, Paris voit son interminable attente d’un véritable Flagship Store récompensée d’une manière incroyable. Un très grand gentleman ce Ralph Lauren…

L'exemple le plus représentatif de la collection Polo estivale. Un retour aux sources pour Ralph Lauren, puisque cette image n'est pas sans rappeler ses vêtements conçus pour le film Gatsby Le Magnifique.

M.C. Escher en Italie.

Impossible de revenir en un article sur l’oeuvre et la vie entières de Maurits Cornelis Escher. Qui plus est, rares sont les clichés le représentant, sauf durant sa période de jeunesse aventurière. En 1922, alors âgé de 24 ans, l’artiste hollandais décide de partir pour l’Italie. Après avoir redoublé deux fois et raté son bac, il s’était orienté vers l’architecture puis les beaux-arts. Peu reconnu par son entourage, il est pourtant déjà un excellent graveur sur bois. Ce voyage en Italie (ci-dessus, à Rome en 1930) va être pour lui une véritable révélation et découverte de soi. Jusqu’en 1935, il parcourt le pays, s’y marie avec Jetta Umiker et produit des centaines et des centaines, de croquis, gravures, lithographies et ses premières oeuvres marquantes. Intégrant des univers complexes dans son art, Escher devient et restera certainement à jamais le maître de la structure de l’espace, des interpénétrations de mondes et des représentations de l’infini. La plupart de ses réalisations rendraient fou n’importe quel esprit et fascinent les physiciens et mathématiciens. Il est d’ailleurs bon de rappeler les mots de sa mère voyant les travaux de son fils,  peu avant son départ pour l’Italie : « Mon fils, tu ne devrais pas tant fumer. »

Les quelques rares clichés de cette période montrent un homme timide, solitaire, aventurier et relativement peu négligeant sur son style...

Castrovalva, 1929. Un paysage qui semble s'étendre à l'infini. C'est l'une des plus belles oeuvres de jeunesse de l'artiste. "Pendant presque toute une journée je suis resté à dessiner sur cet étroit sentier de montagne. Au-dessus de moi il y avait une école et j'écoutais avec plaisir les voix limpides des enfants chantant des chansons." *

"Escher se sent chez lui en Italie. Chaque printemps, il entreprend un voyage : les Abruzzes, la Campagne romaine, la Calabre, la Sicile, la Corse et Malte. Il part généralement avec d'autres artistes qu'il a connus à Rome." *

La Main dans une Boule de cristal, 1935. Cette lithographie réalisée en Italie témoigne du monde fou dans lequel s'apprête à évoluer Escher. C'est lui-même qui tient et se reflète dans la sphère.

Après de multiples rencontres, des milliers de kilomètres parcourus et un carnet de voyage bien rempli, Escher quitte l'Italie. Le climat instauré par Mussollini est devenu insupportable. Avec sa famille, il part pour la Suisse, la Belgique, avant son retour aux Pays-Bas. Le musée Escher de La Haye est l'unique lieu au monde consacré à l'artiste.

Trois ans après avoir quitté l'Italie, Escher réalise la première véritable synthèse de ses pensées : l'estampte Jour et Nuit (1938).

* in Le Miroir Magique de M.C. Escher, par Bruno Ernst (Editions Taco, 1986)